Je soupirais. Bien que je ne vois pas mon père, je devinais aux sons qu'il venait encore de finir une bouteille. A l'odeur, je dirais qu'il est en train de s'enivrer de wiski. Berk. Il n'y avait pas de psychologue à Asgard, c'est bien dommage. J'essayais de lui parler, des fois. Mais je sentais que quelque part, il m'en voulait. Maman était morte par ma faute: elle avait été détruite par le chagrin que lui insufflais mon handicap. Soupirant une nouvelle fois, je me levais de ma chaise, quittant le salon pour retrouver ma chambre. Dans cette maison, je pouvais me balader librement sans me cogner ni trébucher: je connaissais tous ses recoins par cœur. Une fois dans la pièce, je sortis mon livre de magie. Le mien, je l'avais écris en braille, bien sûr. L'écriture des aveugles dit-on. Mais j'adorais ça, même lorsque j'avais la vue, lorsqu'il s'agissait de lire: je fermais les yeux et déplaçais mes doigts sur les pages de mon ouvrage pour me délecter de ce toucher qui me permettait la culture. En revanche, lorsque je voulais livre un roman fantastique ou autre et que je l'achetais en magasin, je devais attendre de retrouver la vue pour le lire, car même à Asgard les livres ne sont pas vendus en mode 'braille'. Révisant un peu mes cours, j'entendis tout à coup qu'on frappait à ma porte.

-Papa, tu peux ouvrir s'il te plait?

Aucune réponse. Bon. Descendant l'escalier, je me retrouvais face à la porte d'entrée que j'ouvris. Je détestais ouvrir aux gens lorsque je n'avais pas la vue, car ne pouvant pas les identifier, j'avais toujours peur de faire entrer un inconnu chez moi. Une fois, une personne s'est présentée comme étant le meilleur ami de mon père. Je l'ai laissé entrer et, aveugle, je n'ai pas vu qu'il nous volait sous mon nez. Je m'en suis voulu durant des mois.

Mais je souriais tout de même, toujours accueillante.

-Bonjour, je peux quelque chose pour vous?

Lorsqu'il me répondit, un large sourire fendit mon visage. Je reconnaissais très bien sa voix à présent. Et je savais pourquoi il était là. Levant les mains jusqu'à mon interlocuteur, je touchais du bout des doigts les courbes du visage d'Aïdan. Je finis par laisser retomber mes mains.

-Ma valise est prête, je vais la chercher et on peut y aller.

Clôturer une valise en mode Aïdan n'avait pas pris très longtemps, une pile de vêtement contemporains dans le fond d'une armoire qu'il avant mit dans un sac à dos. Le pyromancien avait ensuite quitté son petit nid douillet, traversant la forêt pour rejoindre la ville et cette petite rue qu'il connaissait désormais. A cet instant, il repensa donc à Tullia, toujours étonné qu'elle ait accepté cette proposition de voyage, d'autant plus qu'elle aurait pu se méfier d'un pyromancien maintenant qu'elle connaissait son identité. Le sac à dos sur une seule épaule, il arriva devant la maison de la sirène, frappant à la porte d'une seule main. Ce fut la jeune brune qui vint lui ouvrir, esquissant un sourire bien qu'elle ne put le voir.

"C'est moi, Aïdan " murmura-t-il doucement.

Il sourit un peu plus lorsqu'elle effleura son visage, s'il avait trouvé ça étrange la première fois, il commençait à s'y habituer à vrai dire. C'était normal désormais. Il l'entendit et croisa les bras sur son torse tout en décidant de l'attendre bien sagement.

" Tu veux un coup de main pour la porter? Après tout une femme déménage toujours lorsqu'elle part en voyage! " Plaisanta-t-il amusé.

Il attendit donc de la voir revenir, attrapant sa valise en bon gentleman avant de la laisser sortir et de la suivre. Il laissa la valise trainer sur le sol, se dirigeant vers leur moyen de locomotion pour rejoindre le monde de ces hommes qui détruisaient leur terre à petit feu. Ça ne l'enchantait pas vraiment de retourner là-bas, encore moins s'il tombait nez à nez sur ses parents qui devaient probablement avoir regagné la capitale anglaise après son départ et surtout après l'incident dont il était l'unique et seul responsable. Forte heureusement, Tullia ne pouvait lire l’expression qu'il affichait sur son visage, perdu un instant dans ses pensées et face à certains souvenirs. Il finit par se ressaisir, préférant penser à l’émerveillement de Tullia. Il s'était assuré que sa chambre dispose d'une grande baignoire, histoire qu'elle puisse profiter quelques heures de la vue après avoir fait quelques exercices avec l'eau. Après tout elle souhaitait voir Londres, autant le faire correctement. Au pire il avait ce vieil appareil photo qui trainait dans son sac, encore avec des films argentiques qu'il devra développer lui-même, comme ça elle pourra regarder plus tard. Il finit par se stopper devant l'engin, tournant la tête vers sa compagne de voyage.

" Tu es prête? " fit-il sûr de lui tout en saisissant sa main pour l'aider à embarquer.

Mes proches s'habituaient vite à ma proximité, à mon côté très tactile. Parfois même lorsque j'ai la vue, je ne peux m'empêcher de toucher, c'est devenu aussi important que de voir à présent. Après avoir identifié Aïdan, j'avais été cherché ma valise sans mal; tant que j'étais dans ma maison, je ne craignais aucun obstacle. Le Pyromancien me fit remarquer qu'en tant que femme, je devais avoir emmené la moitié de mes affaires. Il n'avait pas totalement tord. Je fis la moue lorsqu'arrivé à sa hauteur, il me prit des mains ma valise.

-Certes. En faite, je ne savais pas du tout quoi prendre. Alors j'ai pris de tout. En passant des polaires s'il neige aux robes de soirée si... si l'on sort.

J'en souriais d'avance. Danser, manger au restaurant... à Londres! J'en avais des frissons. Je passais mon bras sous celui d'Aïdan, pour me repérer mais aussi pour lui montrer que ça me faisait plaisir d'y aller avec lui. On arriva près du petit aéroport, le seul, l'unique d'Asgard. Il n'y avait qu'un avion, un priver dirons nous, puisqu'on ne peut se permettre que les Humains découvrent notre ville, il fallait que l'avion et le conducteur de l'engin viennent d'Asgard. Aïdan me demanda si j'étais prête et j'hochais la tête, puisque lui pouvait le voir. Il prit a main et je le suivis à l'intérieur de l'avion où on s'installa. Je n'étais pas inquiète, après tout, le conducteur n'était autre qu'une Fée! Si chez les Humains les accidents en avion étaient possibles, pas ici.

-Tu as un programme pour notre séjour?

Curieuse, bien que mes yeux soient moins éclatants que lorsque j'avais la vue, on pouvait y lire mon côté enfantin, pétillant. Une pensée me frôla l'esprit: je n'avais même pas prévenu mon père de notre voyage. D'un certain côté je culpabilisais, de l'autre c'était un bon moyen de voir s'il remarquerait mon absence ou pas. Malheureusement, j'avais déjà une idée là dessus...

La taille de la valise de Tullia était effectivement une valise féminine. Lui qui prenait ça pour un cliché voila qu'il se confronta à une bien dure réalité. Il rit d'ailleurs à sa remarque, Londres n'était pas non plus l'Alaska après tout. Ils se dirigèrent donc vers le petit avion qui allait les amener à destination, même si bon il n'était pas non plus rassuré d'emprunter la voie des airs, le plancher des vaches, c'est sacré pour lui! Non pas qu'il redoutait un accident, loin de là, il était on ne peu plus à l'aise à ce niveau, mais la hauteur, non il n'aimait pas ça! Il aida la sirène à arriver à bon port, prenant place à côté d'elle pour ensuite qu'ils décollent vers l'infini et l'au delà. Il chargea son films dans son appareil photo préférant déjà travailler là dessus à son arrivée puisqu'elle ne verra rien pour le moment tandis qu'elle lui demanda s'il avait un programme. Il releva alors la tête vers elle en esquissant un sourire vu ce petit éclat pétillant dans son regard pourtant aveugle.

"Et bien pour commencer aller déposer ta garde-robe à l'hôtel. Il est très chouette, je t'ai réservé une suite avec une grande baignoire histoire que tu puisse un peu user de ton pouvoir si tu veux voir ça de tes yeux. "

Il ne précisa pas qu'il ne logerait pas dans le même hôtel, voulant éviter toute question et dangers d'ailleurs. C'était mieux qu'il ne dorme pas au centre ville. Il se détendit dans son siège après une légère turbulence. Il ne donna pas plus de détail, voulant improviser au fur et à mesure à vrai dire, mas il comptait bien l'évader.

" J'espère seulement qu'il ne pleuvra pas "

Effectivement ça serait embêtant, mais ils finirent par redescendre en dessous des nuages et par chance il n'y avait pas la moindre goûte d'eau. Ils atterrirent tout en douceur (en même temps avec un tel pilote). Aïdan attrapa les valises tout en dirigeant Tullia, l'attrapant par le bras pour se diriger dans l'aéroport. Une fois sortit, il les dirigea vers l'hôtel dans un de ses bus à double étage. Ils entrèrent, très bien accueillis d'ailleurs avant d'être dirigé dans la suite qui serait celle de la jeune sirène. Il déposa sa valise sur le lit.

" Voila, alors je vais te faire faire le tour du propriétaire, déjà c'est joli et propre si tu veux savoir, pas de cafard qui risquent de venir te manger pendant la nuit " Plaisanta-t-il. " Par contre je ne logerai pas ici. " fit-il en soupirant. Après tout il devait bien lui dire pour ne pas l'inquiéter.

A la petite pression des doigts d'Aïdan sur ma paume lorsqu'il m'aida à monter dans l'avion et à m'installer, je compris qu'il n'était pas très rassuré de prendre l'avion, et je l'avoue, ça me fit sourire.

-Et bien pour commencer aller déposer ta garde-robe à l'hôtel. Il est très chouette, je t'ai réservé une suite avec une grande baignoire histoire que tu puisse un peu user de ton pouvoir si tu veux voir ça de tes yeux.

-Ma 'garde robe'? J'y suis pour rien si tu ne m'as donné aucune instruction sur ce que je devais prendre ou pas!

Je lui tirais la langue, comme une gamine, encore. J'imaginais déjà la chambre, je trouvais ça vraiment adorable qu'il ait prit soin de réserver des chambres à l’hôtel, et EN PLUS d'avoir pensé à mon handicap. J'allais donc pouvoir profiter de cette baignoire pour user un peu de mes dons afin de m'octroyer quelques heures de vue, même si une simple baignoire ne me permettrait pas de voir toute une journée, peu importait, j'aurais la richesse de connaître Londres sous deux angles: Par sa beauté, mais aussi par son atmosphère. Car c'est bien connu, un aveugle a bien plus de ressentis qu'un voyant!

-C'est vraiment gentil, pour la chambre, lui soufflais-je.

Il espérait qu'il ne pleuve pas, et il m'arracha encore un sourire. Il semblait si préoccupait de tout bien faire dans ce voyage. Pour ma part, j'étais sûr que ça serait parfait! Et s'il pleuvait...

-Le point positif de ma garde robe: j'ai de quoi être recouverte de la tête aux pieds pour les jours de pluie! Aucun soucis, donc.

On atterrit en douceur, et je fus guidée par Aïdan pour sortir de l'appareil ainsi que pour me diriger dans l'aéroport. Tout ce bruit! Je n'avais jamais été dans un aéroport aussi grand, je venais d'une ville plus petite, ici, à Londres, tout semblait amplifié. Mais je gardais le sourire et suivais le Pyromancien, qui m’emmena à l'hôtel. Je devinais le sourire de la femme d'accueil rien qu'au son de sa voix, nous étions en effet très bien accueillit! Une fois dans ma chambre, Aïdan déposa mes affaires et me proposa de me faire visiter, je le suivis sans rien dire, jusqu'à qu'il lance sur le ton de l'humour qu'il n'y aurait pas de cafards.

-S'il n'y a pas de cafards, c'est que tout est parfait, alors.

Je lui souris et, reconnaissant la salle de bain, caressais du bout des doigts le robinet, très tentée d'ouvrir l'eau pour en sentir le contact sur ma peau, mais me reprit bien vite pour éviter au Pyromancien d'assister à une transformation non prévue. Pas qu'il aurait été choqué, mais tout de même.

-Par contre je ne logerai pas ici.

Je me retournais brusquement pour lui faire face -inutile puisque que je ne le voyais pas mieux mais bon-, surprise.

-Ah bon? Pourquoi? Tu as peur que les gens se posent des questions? Que deux êtres surnaturels ça fasse trop? Ils ne le sauront pas, tu sais.